Chacun s'associera ou non s'il le souhaite.
A vous tous, joueurs du FCSM,
Nous ne nous connaissons pas personnellement, ou si peu, et nos destins seront pourtant éternellement liés par la force du souvenir. Vous avez fait le choix un jour de porter le maillot du FC Sochaux-Montbéliard pour poursuivre votre progression, relancer votre carrière ou vous permettre tout simplement de vivre de votre rêve. Nos chemins se croisent aujourd'hui, se sépareront demain, parce que tel est le lot de tous les supporters comme tous les joueurs de football. Les hommes passent, mais le club reste.
La plupart du temps en tout cas. Le FC Sochaux-Montbéliard est aujourd'hui en danger de mort. Je ne vous l'apprendrai pas. Vous avez le malheur d'être associés à la période la plus sombre de l'histoire d'un club légendaire dans le paysage français, véhiculant des valeurs d'authenticité, de solidarité et d'humilité aujourd'hui menacées par la guillotine du foot business dont ont déjà été victimes d'autres mythes hexagonaux.
Vous êtes comme nous et l'ensemble des salariés impuissants du club les victimes collatérales d'une situation de laquelle vous n'êtes nullement responsables. Les relations entre joueurs et supporters sont parfois houleuses, parce que passionnelles. Nos manifestations d'impatience, de peur ou de colère à l'égard de certaines performances peuvent être assimilées à une forme d'injustice pour vous qui, sur le terrain, avez l'impression de tout donner. Ces sentiments contraires sont d'autant plus exacerbés chez nous depuis trois ans que nous sommes orphelins de notre famille, Peugeot, dont la défection reste perçue comme une trahison douloureuse.
Malgré des séquences d'agacement, d'incompréhension, de mots dépassant les pensées des uns et des autres en raison de résultats sportifs parfois insatisfaisants aux yeux d'amoureux du FCSM peu habitués à voir leur club sombrer dans l'anonymat de la L2, nous ne pouvons que nous incliner devant l'énergie que vous déployez depuis le début de la saison pour sauver l'image de notre club de cœur et lui rendre une part de sa superbe.
Lorsque l'investissement prend le pas sur les seuls résultats, quand un supporter est à nouveau fier de ses couleurs même lorsque son équipe ne caracole pas en tête du classement, les joueurs peuvent avoir la certitude de faire honneur à leur maillot. Et c'est votre cas.
Aussi fragile soit-il, l'équilibre sportif dont vous êtes les garants nous offre l'infime et ultime espoir de ne pas voir la passion de notre vie se transformer en souvenir mélancolique. Nous croyons en vous et votre entraîneur depuis le premier match de la saison face à Bourg-en-Bresse. Nous avons cru en l'idée d'être tous ensemble invincibles lorsque Florian Martin catapultait le ballon en lucarne à Nancy en toute fin de match. Nous n'avons jamais perdu confiance en votre foi lorsque s'accumulaient les déroutes au mois de septembre. Nous continuons chaque jour qui passe à croire en vous, parce que vous nous en donnez de sérieuses raisons. Nous avons la faiblesse – la force ? - de croire que tout cela n'est possible parce que pour vous aussi, le FC Sochaux-Montbéliard représente une partie de vous dont vous êtes fiers.
Nous sommes abasourdis par la lecture de la presse régionale ce matin, énumérant vos noms comme des produits de première nécessité sur une liste de course, considérés par les décisionnaires du club comme du bétail à céder gracieusement au plus offrant pour leur permettre de sauver leur orgueil et leur vanité au détriment de la survie du club et de l'esprit d'équipe que vous vous acharnez à protéger depuis six mois. Nous ne vous apprendrons rien sur nos inquiétudes et notre colère face aux businessmen qui possèdent aujourd'hui notre club. Vous l'avez entendue. Vous savez qu'elle ne vous concerne pas, que le combat que nous menons contre ces obscurs personnages ne fait que renforcer la confiance que nous plaçons en vous.
L'idée que vous puissiez dès le mois de janvier à venir être considérés comme des marchandises destinées à combler un déficit contre lequel nous nous élevons depuis des mois nous est insupportable. L'idée que l'élan sportif que vous impulsez puisse être brisé sur l'autel des mensonges et du vice nous accable. Nous n'accepterons pas de voir notre équipe dépouillée de ses éléments sous prétexte que ceux-là sont en fin de contrat, prêtés ou parce que leur valeur marchande – effroyable terminologie – pourrait retarder l'inévitable. Nous l'accepterons moins encore si ces choix se font à l'encontre de la volonté de ceux qui en seront victimes.
Peut-être nous trompons-nous sur l'attachement que nous imaginons être le votre pour le FCSM. Auquel cas ce message ne restera qu'un lamentable et romantique cri d'amour à sens unique. Mais peut-être aussi la situation de notre club vous consterne-t-elle vous aussi, vous chagrine, vous révolte. Parce que vous vous y sentez bien, parce que vous avez été sensibles aux gens que vous rencontrez chaque jour, devant lesquels vous jouez deux fois par mois, vous vous entraînez tous les jours, pour qui ce club est tout, simplement tout. Nous ne sommes pas, à n'en pas douter, le public le plus bruyant de France, le plus irrationnel ou le plus nombreux, mais cela n'enlève en rien la puissance et la sincérité de la passion qui anime chacun d'entre nous et le respect qui est le nôtre pour ceux qui nous font l'honneur, une partie de leur carrière, de nous représenter et de porter haut les couleurs qui nous font vivre.
Vous avez ces jours l'occasion d'être maîtres de votre destin, de refuser la fatalité d'un univers où plus rien d'autre que l'argent n'a de valeur, où l'on décidera pour vous de ce que vous avez à faire pour le bien d'une entité qui vous dépasse, qui nous dépasse. Si vous croyez en vous, en votre entraîneur, en votre force collective et individuelle, si vous croyez en nous, en notre déférence, en notre inconditionnel soutien au-delà des bisbilles de circonstances, si vous croyez que l'entité FCSM vaut bien mieux que de servir de paillasson à quelques cols blancs, nous vous demandons solennellement de dire « non ».
Nous vous exhortons à refuser la porte de sortie que l'on vous montrera du doigt vous expliquant que c'est le mieux pour vous. Nous vous demandons de croire que le FC Sochaux-Montbéliard n'est pas Wing Sang Li, pas plus qu'il n'est n'importe quel entrepreneur venu ici tenter de se faire un nom au détriment de celui du club. Pensez que vous êtes aujourd'hui notre dernier espoir de ne pas voir le club que nous avons dans la chair, dans le sang, dans l'âme sombrer dans les oubliettes du football français. Nous en faisons appel à votre grandeur d'hommes. Les footballeurs que vous êtes ne seront pas moins libres de signer où ils le souhaitent dans six mois qu'ils ne le sont aujourd'hui. Nous ne doutons pour l'avenir d'aucun d'entre vous. Nous avons en revanche très peur pour le notre.
Oui, parce que vous avez un jour fait le choix de porter le maillot du FC Sochaux-Montbéliard, nos destins sont éternellement liés. Vous avez l'occasion de faire en sorte que ça ne soit pas pour le pire. Vous avez l'occasion, Maxence, Lawrence, Aubin, Mickaël, Nicolas, Adolphe, Zakarya, Florent, Jason, Rayan, Pierre, Patrick, Jeando, Florin, Aksel, Florian, Mart, Jean, Sofiane, Florian, El Hadji, Martin, Thomas, Moussa, Faneva, Yoann, Aldo, Bryan, Axel, Yakou, de voir vos noms marquer la légende du club – autant que ceux qui l'ont porté au sommet dans les années 80 ou 2000 – en refusant de vous associer aux manœuvres des fossoyeurs qui tentent de nous faire disparaître pour mieux sauver leurs comptes en banque.
Nous croyons en vous. Ensemble, continuons à faire vivre le FCSM. Ne quittez pas le navire qui coule. Dites « non ». L'histoire n'en sera que plus belle !
Longue vie à nous tous !