Récemment, la presse quotidienne régionale a abordé le sujet de l’affluence à Bonal [1], établissant le constat d’une très sévère baisse (-19% pour le total du nombre d’abonnés, -23% hors partenaires [2]). Pour chercher des explications, elle est allée frapper à la porte du Président Lacombe qui, saisissant l’occasion qui lui était donnée, a pu faire diversion sur ses responsabilités. Problème : ses incantations ne serviront à rien tant que le phénomène ne sera pas analysé avec les principaux intéressés : les supporters eux-mêmes.
Un contexte sportif délétère
Lors des trois dernières saisons, le FCSM a fait face à un manque chronique de résultats couplé la plupart du temps à une faible qualité de jeu. Il n’est ainsi pas sorti indemne dans la relation qu’il entretient avec ses propres supporters, lesquels ont enduré cette longue période de vaches maigres avec beaucoup de patience et de retenue, mais non sans accumuler colère, frustration, déception, et parfois même honte et écœurement. Le summum a été atteint avec cette fin de saison dernière "en roue libre" aux allures de débâcle [3], ponctuée de défaites à répétitions (5 de suite à domicile pour clore la saison) et de camouflets (0-3 face à Boulogne après un 2-5 devant Valenciennes plus tôt dans la saison).
Après la cruelle élimination en ¼ de finale de la coupe de France à Monaco et un maintien officieusement acquis dès le début du printemps, c'est dans ce terreau bien peu fertile que la campagne d'abonnements 2010-2011 devait essayer de prendre racine. Malgré les tentatives répétées des représentants des associations de supporters pour relayer l'état d'esprit général à la direction [4], cette dernière n'a pas semblé prendre la mesure de la situation. Nous pensons qu'elle a commis plusieurs erreurs dont la conjonction a mené aux chiffres désastreux de la campagne d'abonnement car plus que la baisse elle-même, c’est surtout l’ampleur sans précédent de celle-ci qui est à noter.
Un discours mortifère
La direction du FCSM a trop laissé Francis Gillot se répandre en discours pessimistes, et très dégradants pour les joueurs (qu’il ne manquait jamais de rabaisser à la première occasion) et aussi pour le club (promis à la relégation). En plus de l'effet psychologique néfaste que l'on imagine aisément tant sur les joueurs que sur les supporters (et tout l’entourage plus ou moins proche du FC Sochaux), cela a contribué à pourrir le "produit" FCSM et par conséquent à faire fuir le « client » puisque l’entraîneur lui même ne prenait pas la peine de le soutenir.
L’effectif du FCSM n’avait pourtant rien à envier à celui de nombre de ses adversaires si l’on se donne la peine de comparer. Pour ne rien arranger, Francis Gillot a joint l'acte à la parole en proposant systématiquement un schéma tactique aussi frileux qu'inefficace [5]. Effet garanti sur les supporters !
Notons toutefois une inflexion subite et bienvenue du discours de notre coach juste avant le début de la présente saison, à l'issue d'une campagne de matches amicaux pourtant calamiteuse où tous les feux étaient à l'orange sanguine. Mieux vaut tard que jamais...
Un courrier aux abonnés indigne
Nous vivons une ère où la communication est primordiale, laquelle, bien maîtrisée, impacte directement les comportements. Celle du FCSM lors de l’intersaison 2010 est un modèle... de ce qu’il ne faut pas faire. Quel esprit fertile a, par exemple, pu accoucher du slogan « Bonal, ça change des soirées raclettes » ?!? Quel talentueux artiste a conçu ce graphisme (dont le stade Bonal transformé en… four à raclette ! ! !), digne d’un enfant de 8 ans après 2 heures de pratique sous Photoshop ? Faut-il à ce point considérer ses propres supporters comme des demeurés pour espérer taper dans le mille avec un tel visuel ? Au moins cela a-t-il permis un détournement de ce fabuleux slogan par les Joyriders [6].
Le contenu du courrier était malheureusement du même tonneau - apparemment pas un millésime inoubliable. On pouvait légitimement s’attendre à ce que le club s’adresse à nous en disant qu’il comprend la frustration et la colère qui nous animent, que lui non plus n’est pas satisfait par les trois saisons écoulées et que des mesures allaient être prises pour ne plus vivre de telles situations. Bref, donner envie de revenir, de l’espoir; tracer une perspective, une ligne directrice, une ambition, un nouvel élan. Que nenni (ma foi) ! Pour faire court, ce fut : « Nos équipes de jeunes ont fait une bonne saison, voici les modalités de réabonnement ». Point barre ! On est carrément dans la négation par omission de ce qui cristallise les sentiments négatifs des supporters.
Combien, à la fin de la lecture de ce courrier, ont eu envie de l’envoyer directement à la poubelle, quand ils ne l’ont pas fait ?
Des hausses de tarifs importantes et inéquitables
Lors de la présentation du projet de la campagne de (ré)abonnement aux associations de supporters, à la dernière intersaison, les hausses envisagées en Populaires et Secondes étaient respectivement de 12 % et 10 %. Cette manœuvre grossière, destinée à faire accepter la hausse finale en donnant l’impression de faire des efforts devant la grogne des supporters, n'aura trompé personne.
D'une part, la hausse moyenne finale dans ces secteurs reste très forte (6 à 11%). De l'ordre de trois à quatre fois supérieure aux hausses précédentes, elle ne pouvait donc absolument pas passer inaperçue [7].
D'autre part, l'étude des hausses de tarifs par tribune [8] entre 2009-2010 et 2010-2011 trahit la volonté de la direction de réduire l'écart de prix entre une place en Populaires et une en Présidentielles [9]. Par conséquent, ces hausses ne sont pas homogènes et les catégories touchées par les plus fortes augmentations sont les plus accessibles: Populaires et Secondes.
Pas besoin d'avoir fait d'études de commerce pour deviner qu'il s'agit des supporters qui font certainement le plus attention à leur budget en période de crise, surtout lorsqu'on leur demande jusqu'à 10% de plus. En d'autres termes, on prend un risque très important en demandant aux supporters les plus fragiles financièrement de fournir le plus gros effort.
Et comme les fans du FCSM garnissant les Populaires et les Secondes ne sont pas plus bêtes que les autres (eh non) et savent eux aussi compter et comparer (eh oui), l’incidence psychologique d’une telle mesure n’est pas compliquée à imaginer.
Des fermetures de secteurs très malvenues
Ajouter des contrariétés aux contrariétés, voilà une drôle de pratique commerciale. Et pourtant, le FCSM l’a fait, croyant masquer la supercherie derrière la phrase lue dans le courrier de réabonnement [10] quand il s’agissait en réalité de tenter d’économiser environ 30000 € de frais de personnel (stadiers + nettoyage). C’est ainsi que sur les 7 blocs composant les Secondes, seuls les trois centraux ont été proposés à l’abonnement, et ce en Nord comme en Sud [11], Lacombe comptant sur un glissement mécanique entre secteurs.
Trente mille euros représentent, en terme de recettes, 177 abonnements plein tarif dans ces tribunes. Un simple coup d'oeil dans les Secondes permet de constater que sur les presque 550 supporters concernés par cette fermeture, une grosse majorité n'a pas renouvelé son abonnement. Sans même parler de la perte en recettes annexes (boutique, amis qui accompagnent etc...), cette mesure s'avère coûter nettement plus qu'elle rapporte.
Ce gâchis aurait pu être évité facilement en consultant les supporters et en cherchant à mieux connaître leurs habitudes et les raisons qui les poussent à venir à Bonal. En effet, on ne choisit pas une place, pas plus qu’on ne la conserve d’année en année, par caprice. On la choisit en priorité car c’est l’angle de vue qui nous convient le mieux et aussi car on y développe des relations humaines avec ses voisins.
Un constat implacable qui appelle des changements radicaux
Quoi qu'en dise Monsieur Lacombe [12], les chiffres de la dernière campagne d'abonnement montrent une claire corrélation entre hausse des tarifs plus fermeture de secteurs, et baisse du nombre d'abonnements [13]. La baisse du nombre d'abonnements "grand public" atteignant 23% et les effectifs restant sensiblement stables en Présidentielles et en Forges, on imagine sans mal l'ampleur du désastre en Populaires, Secondes et Latérales. Sauf à se lancer dans la psychologie appliquée aux catégories socio-professionnelles, qui conduirait à conclure que les supporters les plus modestes sont ceux qui aiment le moins leur club et donc le lâchent en premier (bonjour la démonstration), le constat est limpide.
Par temps de crise, nous comprenons le souci de notre président de faire des économies et de gérer au plus près le budget. Le problème est que cela tourne à l’obsession [14], ce qui conduit à des tentatives d'économies de bouts de chandelles qui au final coûtent plus qu’elles ne rapportent, mais aussi à des partenariats nauséabonds (bernardtapie.com, présent sur le site officiel avec flyers distribués un soir de match face à... Valenciennes !!!) que les valeurs d'un club comme le FCSM devraient absolument proscrire.
Pendant ce temps, Bonal se vide. Il ne faut pas se méprendre : ce n'est pas qu'une question de convivialité ni d'ambiance, mais un réel problème économique pour le club. S'il est évidemment difficile de quantifier l'impact du "douzième homme" sur les résultats de l'équipe, il n'est pas déraisonnable de penser que le public jaune et bleu peut contribuer à faire gagner quelques points à l'équipe sur toute une saison, en motivant les joueurs pour revenir au score ou "tuer" un match, en mettant un peu de pression sur les arbitres, les adversaires... des points supplémentaires qui auraient un impact direct sur le classement. Par exemple, une place de mieux en milieu de tableau, ce sont 800 000 € supplémentaires de droits TV ! Faites le calcul pour 2 ou 3 places gagnées.
Inutile de dire que repeupler Bonal accroîtra également mécaniquement les recettes de produits dérivés et la notoriété du club dans la région, les vertus commerciales du bouche à oreille n'étant plus à démontrer.
A l'instar d'économistes du sport tel Vincent Chaudel [15], nous ne cesserons jamais de clamer qu'un stade bien rempli, c'est le début d'un cercle vertueux menant à la prospérité d'un club. Le FC Lorient l'a bien compris et a baissé ses tarifs, avec des effets immédiats sur le remplissage et les recettes [16]. Mais cet aspect semble complètement négligé par la direction du FCSM. Avant de toucher aux tarifs ou aux conditions d'abonnement, on doit anticiper sérieusement les réactions des supporters. Avant de lancer une campagne de publicité ou d'abonnement, on doit bien réfléchir à ce que l'on y inclut, pour ne pas donner l'impression de prendre les clients potentiels pour des demeurés et/ou des vaches à lait. Et surtout, avant d'opter pour une ligne de défense hypocrite et d’avancer des excuses peu convaincantes qui ne sont au final que prétextes (météo, vacances, calendrier, coûts divers, crise dont le dos est plus large que celui d'Alain Bernard etc…), on doit se demander si c'est réellement dans l'intérêt du club.
La chute brutale de fréquentation du stade Bonal cette saison n’est pas une fatalité mais la résultante des divers facteurs développés ci-dessus. Penser que les bons résultats actuels et les diverses incantations entendues ici ou lues là suffiront, c’est faire (une nouvelle) erreur même si le président Lacombe compte sur le lancement notable d'une campagne d'abonnement à mi-saison pour "se refaire un peu la cerise."
Reconquérir son public prendra du temps (de nouvelles habitudes et occupations ont remplacé celle d’aller naturellement au stade) et si on encourage sincèrement l’équipe à maintenir son niveau et sa qualité de jeu (que nous saluons) pour y contribuer, le président Lacombe et son équipe ne pourront pas faire l’économie d’une sérieuse autocritique, et d’une remise en cause de certains choix. Un peu d’introspection n’a jamais fait de mal à personne mais la lecture de la dernière interview du président Lacombe dans le Pays [17] démontre qu'au FCSM, on n'est pas encore entré dans cette phase. Et comme, à force d'entendre plutôt que d'écouter, les relations avec les associations de supporters commencent à se distendre...
[1] Article du Pays du 24/11/2010. Cliquez sur le lien suivant: 3911 spectateurs de perdus en deux saisons
[2] De 7500 à 6100 abonnements en tout, et de 5200 à 4000 pour le "grand public", chiffres officiels.
[3] 5 points pris sur 30 possibles, soit 1 victoire, 2 nuls et 7 défaites lors des 10 derniers matches. Lanterne rouge lors de la phase retour avec seulement 5 buts inscrits à Bonal lors de cette phase.
[4] Lors des rencontres direction/supporters mais également sur notre site. Cliquez sur le lien suivant: Lettre ouverte au président du FCSM
[5] Nous avions déjà dénoncé cette situation la saison passée. Cliquez sur le lien suivant: J'ai perdu mon Gillot de sauvetage
[6] Lors de Sochaux – Arles en ouverture du championnat, ils avaient déployé une banderole bienvenue : « Les soirées raclette, ça change des soirées raclées ». Depuis 3 rencontres, un chant "Merci Lacombe d'avoir vidé le stade" est régulièrement entonné. Comme on les comprend...
[7] En lui faisant remarquer le niveau de la hausse en réunion, Lacombe a rétorqué "je n'ai pas augmenté les abonnements la saison passée alors je peux me le permettre". Chacun appréciera donc la portée du geste lors de l'intersaison précédente qui n'était au final qu'un leurre.
[8] Réabonnement: + 6.89 % en Populaires, + 6.25 % en Secondes, + 6.79 % en Latérales, + 1.37 % en Forges et + 0 % en Présidentielles.
Abonnement: + 10.86 % en Populaires, + 8.65 % en Secondes, + 5.45 % en Latérales, + 1.33 % en Forges et + 0 % en Présidentielles.
Tarif au match: + 10 % en Populaires, +6.66 % en Secondes, + 0 % en Latérales, + 4 % en Forges et + 0 % en Présidentielles.
[9] Après avoir accepté l’idée d’un statu quo tarifaire la saison passée (plaidé par les associations de supporters) concernant les réabonnements, le président Lacombe avait ajouté que selon lui « les places les moins chères ne le sont pas assez et les plus chères le sont trop », concluant par un « il faudra y arriver ». Et les choses n’ont pas tardé puisque les prix sont repartis à la hausse. Mais pas du niveau de l’inflation (1.6 % sur un an) ou de la hausse du pouvoir d’achat ! (Enfin, ça dépend pour qui...)
[10] "Par ailleurs, afin d'optimiser le remplissage de tribunes, seuls les abonnés pourront acquérir des places dans l'anneau supérieur des Tribunes Secondes"
[11] Lors de la réunion dirigeants / supporters sur le thème des (ré)abonnements citée précédemment, seuls les secteurs occupés par les supporters dits "actifs" (Ultras et Supporter Club) étaient proposés à l’abonnement. Manœuvre, là aussi, destinée à faire accepter la fermeture de 4 secteurs sur 7 dans chaque tribune.
Nota: un mail a été envoyé à la direction du club suite à cette réunion invitant le président Lacombe a reconsidérer ce choix en ouvrant au moins les virages face caméra des tribunes Secondes afin de permettre à ceux qui apprécient cet angle de vue de le conserver. En pure perte alors qu'une telle option aurait permis de limiter la casse.
[12] Dans un article du Pays (cliquez sur le lien suivant: Attristé plutôt qu'inquiet), il est indiqué de la part du président Lacombe « Et je ne pense pas que l’augmentation des tarifs à Sochaux (ndlr : de moins de 10 % semble t-il et qui n’avaient pas été augmentés depuis plus de 3 ans) y est pour quelque chose.» On apprend ainsi que les tarifs n’auraient pas été augmentés depuis plus de 3 ans, mensonge éhonté que la simple consultation des tarifs joints aux courriers de réabonnement chaque année permet de démasquer.
[13] Lors de la première réunion dirigeants / supporters de la saison, fin septembre, le président Lacombe a indiqué (après avoir livré les chiffres globaux repris dans cet article) que le nombre des abonnés était resté stable en Présidentielles et en Forges mais avait beaucoup chuté ailleurs, principalement en Populaires et en Secondes.
[14] D’ailleurs, les supporters ne sont pas les seules "victimes" des économies de bouts de chandelles présidentielles puisque les joueurs, pour l’anecdote, s’étaient vu privés (entre autres) de la corbeille de fruits secs dans les vestiaires. Un budget de quelques dizaines d’euros à l’année et qui a valu à Monsieur Lacombe d’être le « héros » bien involontaire d’un blog politique de premier plan (cliquez sur le lien suivant: Les mauvais comptes d'Alexandre) dont se sera délecté le petit monde politico-socio-économique parisien ! Mais aux dernières nouvelles, la corbeille de fruits secs serait réapparue...
[15] Cliquez sur le lien suivant: Interview de Vincent Chaudel, d'Ineum Consulting
[16] Cliquez sur le lien suivant: Lorient fait sa pelote
[17] Cliquez sur le lien suivant: Interview de Lacombe
Bonal se vide, les explications des supporters
Débuté par Clyde, déc. 20 2010 13:05
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