J'en prends acte et t'en félicite !
Je conçois qu'on puisse considérer le mode de scrutin des présidentielles comme imparfait, ce qui n'est pas mon cas, mais reconnais que le modifier ne pourrait qu'ouvrir immédiatement sur une suspicion de bidouillage calculé.
Surtout si on le rapporte au mode de scrutin législatif qui, pour le coup, est antidémocratique au possible puisqu'il permet via le jeu des alliances de circonstances à des partis confidentiels d'être mieux représentés au Parlement que le RN, 2eme parti du pays.
Autant je conçois la nécessité d'éviter un retour à la 4eme République, aux changements de majorité incessants aboutissant à un pays ingouvernable, autant on a basculé depuis longtemps dans un déni de démocratie, lequel s'avère de surcroît contre-productif pour qui prétend lutter contre l'extrême-droite.
Ce que je ne comprends pas, pour ma part, c'est en quoi réfléchir à régénérer une "démocratie" à bout de souffle, dont 11 millions de gens n'acceptent plus les modalités, qui transforme la rue en poudrière car redevenue le lieu privilégié d'expression, ce serait "remettre en cause l'un des fondements de la Vème République" et pourquoi ce serait "gênant".
À l'exception d'un attachement un peu désuet - bien que je le respecte tout-à-fait - je ne vois pas concrètement en quoi imaginer une triangulaire plutôt qu'un duel au second tour mettrait à ce point en péril la Veme République, plutôt que d'être une solution pour l'adapter aux exigences de l'époque qui, clairement, sont de moins en moins en phase avec les modalités de ce scrutin.
Permettre aux trois candidats arrivés en tête de se présenter aux suffrages au second tour, c'est permettre à chacun d'exprimer une conviction au premier tour tout en ayant l'occasion de faire un vrai choix du moins pire au 2ème. Ça limite les colères, les désaffections, les accusations de confiscation du vote au profit de deux offres qui ne conviennent pas à un tiers des votants.
Tu me dis que ce serait "ouvrir immédiatement une suspicion de bidouillage calculé". Pardonne-moi, mais moi, c'est plutôt la stratégie de Macron consistant à valoriser Le Pen pendant 5 ans pour assurer sa réélection, à envoyer Darmanin lui dire qu'elle est "molle", à la banaliser jusque dans les recoins, pour au final revenir jouer le refrain du fascisme et du barrage, qui m'apparaît comme un bidouillage et une manipulation absolue de ce mode de scrutin.
Je veux bien que l'on soit attaché à la Vème, mais elle n'aura pas ad vitam aeternam mon respect par pure déférence au général.
Macron, c'est une grenade dégoupillée. Et ça l'est parce que cette élection, elle est avant tout un rejet massif et convaincu de sa politique et surtout de sa philosophie, avec ses seuls vrais opposants (pas ceux qui se sont planqués dans des mairies, des conseils régionaux ou des plateaux télé pendant 5 ans et débarquent à 5 mois de l'élection en disant "coucou, je suis là") qui obtiennent près d'une voix sur deux.
Et pourtant, parce qu'il faut encore et encore et encore et encore se donner bonne conscience - ou plutôt permettre à ceux qui vont nous coller au cul pendant deux semaines avec leur moraline à la con de se donner eux-mêmes bonne conscience - Macron va être réélu.
Contrairement à toi, cette écriture de l'Histoire, oui, je la considère imparfaite.
Et continuer à penser qu'il ne faudrait SURTOUT PAS toucher à la Vème parce que De Gaulle, toussa, ça se respecte, pour moi, ça va nous mener au chaos.
Donc je prends les devants et je m'interroge sur la manière de rendre un peu de pouvoir aux gens et rendre la démocratie plus saine au moment de l'élection présidentielle.
Je pense que les sondages devraient être interdits dès lors que le Conseil Constitutionnel valide le casting officiel, soit six ou huit semaines avant l'élection, pour que les gens puissent voter en âme et conscience, face aux programmes de chacun, et c'est tout.
Idem pour le temps de parole. J'en ai rien à branler que ça emmerde Pascal Praud, Olivier Truchot et Jean-Michel Aphatie de devoir donner du temps de parole à Nathalie Arthaud et de devoir bosser différemment pendant deux mois.
Et ensuite, il y a cette histoire de triangulaire. Parce qu'avec une triangulaire, tout le monde ce matin se sentirait encore impliqué, même à la marge, plutôt que de nourrir un ressentiment qui finira encore par éclater, peut-être plus violemment qu'il y a 4 ans. Et ce n'est pas parce que le résultat ne me plait pas, mais parce que je considère vraiment que ce duel est un verrou dangereux et qu'une confrontation à trois serait beaucoup plus respirable, quand bien même la gauche n'y aurait pas été.
Hormis l'attachement aux fondements de la Ve, j'aimerais comprendre en quoi ce serait "gênant" de poser le débat. Parce que le vainqueur aurait une légitimité plus faible puisqu'il n'atteindrait pas les 50% ? Je rappelle qu'en 2017, le bloc arrivé premier au second tour, c'est abstention/blancs/nuls. Pas Macron. La légitimité, elle ne se conquiert pas grâce à une majorité absolue, mais au terme d'un combat à là loyal.
En 2022, je n'ai pas l'impression que ce scrutin soit la définition du loyal.