Décès de Joëlle Aubron, membre historique d'Action directe
PARIS (AFP) - Joëlle Aubron, l'une des quatre membres historiques d' Action directe (AD), mouvement terroriste des années 80, est décédée mercredi après-midi à Paris à l'âge de 46 ans, a annoncé à l'AFP Alain Pojolat, membre du comité de soutien aux militants d'AD emprisonnés.
Joëlle Aubron, qui souffrait d'un cancer aux poumons, était dans le coma depuis plusieurs jours, a précisé Alain Pojolat, ajoutant que ses parents se trouvaient à son chevet.
Elle était la seule des quatre membres historiques du mouvement terroriste en liberté après avoir bénéficié d'une suspension de peine en juin 2004 à la suite d'une opération d'une tumeur au cerveau. Son cancer principal, aux poumons, avait été détecté un an après sa libération.
Avec Nathalie Ménigon, Georges Cipriani et Jean-Marc Rouillan, Joëlle Aubron avait été condamnée à deux reprises, en 1989 et 1994, par la cour d'assises de Paris à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 18 ans, notamment pour les assassinats du PDG de Renault, Georges Besse, et de l'ingénieur général de l'armement, René Audran.
Au moment de sa libération, Joëlle Aubron était détenue depuis 1987.
Son état s'était dégradé depuis une hospitalisation en mai 2005 pour une double fracture de la jambe.
Elle se trouvait depuis début février dans une unité de soins palliatifs à Paris et avait souffert récemment de complications pulmonaires.
"Jusqu'à son dernier souffle, son souci principal aura été la libération de ses camarades d'Action Directe encore détenus", a déclaré à l'AFP Alain Pojolat.
L'état de santé de deux autres membres d'AD, toujours détenus, est très dégradé. Nathalie Ménigon, 47 ans, est dépressive et partiellement hémiplégique et Georges Cipriani, 53 ans, a fait depuis 2001 plusieurs séjours en hôpital psychiatrique.
Dans divers interviews, Joëlle Aubron avait déclaré ne pouvoir "formuler ni regrets ni repentir", jugeant "cela indécent par rapport aux victimes et à ceux qui restent".
"En choisissant la lutte armée, je n'ai jamais pensé que j'avais raison : je ne suis pas de ceux qui pensent qu'ils détiennent la vérité", avait-elle aussi expliqué.
"Ce n'est jamais la haine qui m'a motivée. De la colère oui, mais pas de la haine. Politiquement, pour moi ces actions avaient raison", déclarait-elle à propos des assassinats de MM. Audran en 1985 et Besse en 1986.
"L'Etat nous laissera au fond du trou sauf si nous nous repentons. Un repentir est hors de notre réalité. Pour nous, le repentir n'est pas une question morale mais une question politique. L'Etat refuse toujours de considérer le caractère politique de nos actes", avait-elle regretté en septembre 2005 commentant le refus de libération de Nathalie Ménigon.
Née dans une famille bourgeoise, Joëlle Aubron avait été arrêtée pour la première fois le 9 avril 1982 et condamnée pour détention d'armes à 4 ans de prison dont 18 mois avec sursis. Quatre mois plus tard, en août 1982, le gouvernement décidait de dissoudre Action Directe.
Après sa libération en janvier 1984, Joëlle Aubron avait épousé un membre d'AD alors en prison, Régis Schleicher, dont elle divorcera par la suite.
Passée à la clandestinité en 1985, elle avait ensuite participé aux assassinats de Georges Besse et de René Audran, immédiatement revendiqués par Action directe. Le 21 février 1987, elle avait été arrêtée par le RAID dans une ferme à Vitry-aux-Loges (Loiret) ainsi que les trois autres leaders historiques d'AD.