Page 15 : "La décision d'éloigner la famille Dibrani est justifiée en droit ; aucun des recours de M. Dibrani n'a été jugé recevable par la justice administrative (CNDA, TA, CAA), ni par la justice judicaire (cour d'appel)."
Plus loin, "M. Dibrani n'a jamais donné suite aux propositions d'embauche qui lui étaient faites, et il ne cachait pas attendre le versement des prestations familiales qui suivraient sa régularisation pour assurer un revenu à sa famille ;
- il n'a jamais présenté de permis de conduire alors qu'il se prétendait chauffeur de poids lourd ;
- il a donné trois versions différentes des raisons pour lesquelles il ne pouvait pas produire de pièce d'identité" (page 17).
Leonarda séchait très souvent l'école
Encore plus il est même précisé que "l'un des élus, conseiller général, qui a suivi cinq familles de déboutés du droit d'asile, dont deux kosovares, a signalé que la famille Dibrani était la seule qui ne s'était pas engagée dans un processus d'intégration, que l'ensemble des efforts fournis pour lui venir en aide avaient en définitive échoué. Il a également souligné l'absentéisme de certains enfants".
La description de Leonarda comme une lycéenne modèle, studieuse a l'école, relève également de la fable. "Selon les données recueillies par la mission, les absences de Leonarda au collège sont de 66 demi-journées en 6e, 31 en 5e, 78 en 4e et 21 1/2 depuis le début de l'année scolaire actuelle." Il est aussi précisé que "la jeune fille découchait régulièrement" (page 9), souvent pour aller chez son copain à Pontarlier.
Les menaces à répétition du père de Leonarda
De même, les affirmations selon lesquelles la famille Dibrani était parfaitement intégrée sont un peu fantaisistes. "Plusieurs témoignages, dont celui de la directrice du centre d'accueil où la famille résidait, ont fait état du défaut d'entretien du logement mis à disposition de la famille et des problèmes de voisinage qui en ont résulté. La famille a d'ailleurs laissé ce logement dans un état de dégradation avancée. D'importants travaux seront nécessaires avant que ce logement puisse de nouveau accueillir une famille de demandeurs d'asile ; les photos produites à la mission ne laissent pas de doute à ce sujet. Une procédure a en outre été établie auprès de la gendarmerie le 26 août 2013 pour différend de voisinage."
"M. Dibrani n'a pas hésité à user de menaces afin d'éviter d'être expulsé de cet appartement. Il a indiqué qu'il ferait exploser une bouteille de gaz devant l'ancien maire de Levier et un membre du réseau de défense des sans-papiers. Aux agents de l'office français d'immigration et d'intégration, qui lui proposaient une aide au retour (8 500 euros, la première fois ; 10 000 euros, une deuxième), il a annoncé qu'il tuerait sa famille s'il était expulsé."
"M. Dibrani a également été placé en garde à vue pour un cambriolage par la communauté de brigade de Saint-Vit le 14 octobre 2010. Il a aussi été mis en cause comme auteur dans un vol commis dans une déchetterie à Levier (communauté de brigade de Pontarlier)."
"Enfin, les filles aînées de M. et Mme Dibrani ont été prises en charge par les services sociaux du conseil général après avoir fait état de violences exercées par leur père (placement en garde à vue pour violences sur mineur par ascendant à la communauté de brigade de Pontarlier le 15 janvier 2013), mais elles se sont ensuite rétractées. Selon l'avis d'un conseiller général, rester dans le foyer où elles avaient alors été placées aurait favorisé leur intégration, elles n'ont pas saisi cette chance."
La famille Dibrani avait épuisé tous les recours
Le rapport reconnaît bien entendu les forces de l'ordre "n'ont pas fait preuve du discernement nécessaire". Mais cette conclusion est immédiatement nuancée par les nombreuses interférences qui ont freiné l'opération. "L'attitude des forces de l'ordre s'explique notamment par l'intervention de tiers à l'administration, notamment de deux soutiens constants de la famille. Le premier d'entre eux, qui a appelé Leonarda Dibrani sur son portable, lui a demandé de pouvoir s'entretenir avec une enseignante organisant la sortie scolaire et a ensuite transmis le téléphone à un officier de gendarmerie ; le second, qui a accompagné la jeune fille vers la voiture de la police aux frontières, l'a consolée et aidée et a pris la précaution, avec une enseignante accompagnante, de mettre la jeune fille à l'abri du regard de ses camarades avant qu'elle prenne place dans le véhicule ; ces deux soutiens, bien que le déplorant, étaient également convaincus que les voies de recours étant épuisées, il fallait respecter les décisions de justice et, surtout, que la séparation du père et des autres membres de la famille serait préjudiciable à tous" (page 15).
"Ces deux personnes (avec quelques autres) ont aidé, depuis deux ans, la famille Dibrani sans compter leur temps, à la fois dans la recherche d'emploi du père, le soutien psychologique à la famille et les démarches administratives. Le nombre de courriers adressés aux différents préfets qui se sont succédé pour solliciter une autorisation de séjour témoigne de leur investissement constant. Un soutien financier régulier a été apporté également par un ancien élu, qui a rassemblé des fonds auprès de ses connaissances et ses proches" (page 16).
Le soin avec lequel ce document administratif a été rédigé, les détails qu'il apporte ne laissent guère de place à la polémique. Après cinq décisions de justice unanimes, il était conforme à la loi de reconduire la famille Dibrani dans son pays, et, mis à part le dérapage commis lors de l'interpellation de Leonarda, cette opération a été menée dans le cadre légal avec toutes les précautions nécessaires et avec humanité. Ce rapport montre également que les difficultés d'intégration des familles venues d'Europe de l'Est soulevées par Manuel Valls sont réelles et que leur volonté de s'intégrer reste discutable.