Posté 20 décembre 2022 - 11:11
Je me demande ce qu'il reste, au fond, dans les cœurs, les résultats ou les émotions, lorsque ces dernières ne sont pas automatiquement liées aux premiers.
Bien sûr, on aurait voulu la gagner cette Coupe, bien sûr, c'est essentiel de se construire un palmarès, de hisser haut son club ou sa nation, mais je ne peux m'empêcher de penser, qu'au final, je retiendrai davantage au fond de moi et éternellement le deuxième but de Mbappé dimanche que la victoire finale de 2018 arrachée sans trop trembler.
J'aime le football pour les émotions qu'il procure, l'allégresse et la tristesse, et le fait qu'il soit la seule entité à pouvoir vous plonger de l'une à l'autre en l'espace de quelques secondes seulement. La tristesse, l'ennui, la colère sont parties intégrantes de l'euphorie. L'explosion, à ce point, sur le but de Mbappé est rendue possible précisément parce que les 80 premières minutes étaient indigentes, constitutives ensuite du sentiment de libération qui a accompagné le ballon au fond des filets. Et ça, ça vaut peut-être tous les résultats du monde.
Que retiennent finalement les supporters parisiens, par exemple, de leurs 7, 8 ou je ne sais combien de titres de champions ces dernières années ? Pas grand chose, je pense. La remontada, par contre, c'est quelque chose. Du désespoir, certes, mais quelque chose.
Pour ma part, la descente sochalienne en L2 est un poignard en plein cœur, dont les conséquences sont encore subies aujourd'hui, mais pas grand chose, dans le même temps, n'a la valeur des semaines qui ont précédé le match contre Evian. Je n'oublierai rien des sentiments qui les ont accompagnées, le but de Mayuka à Rennes reste quelque chose de gravé à jamais malgré la descente une semaine plus tard.
D'où une question qui m'intéresse à ceux ici qui ont connu le traumatisme de 1982, qui semble se transmettre génétiquement de pères en fils, que je n'ai connu qu'à la marge, c'est-à-dire de ce qu'on m'en raconte puisque je n'étais pas né :
Est-ce qu'au final, sachant que cette défaite est constitutive de votre passion pour le football, avec le souvenir inaltérable qui lui est associé, vous échangeriez ce moment, cette émotion, ce désespoir, cette colère, en résume ce souvenir dont vous vous rappelez sans doute chaque instant, chaque sensation, chaque image associée, contre une étoile supplémentaire sur le maillot, avec un France-Allemagne qui n'aurait pas existé comme tel, qui se serait soldé par un bon 2-0 ?
Parce que derrière cette question se cache un peu de ce que l'on attend du football, tout est travaillé, organisé, pensé pour le résultat, la victoire, le triomphe, la montée, la qualification, mais qu'est-ce qu'il reste à terme entre la ligne au palmarès et les émotions ressenties ?
Étant acquis, bien sûr, que l'idéal reste l'émotion forte associé au résultat, on est bien d'accord, type finale de coupe de France 2007. Mais ce n'est pas toujours aussi simple.
"Hé camarade, si les jeux sont faits, au son des mascarades on pourra toujours se marrer !"