La peur du vide
Stupéfait devant la désaffection du public de Bonal depuis le début de l’année, le club doubiste a décidé de tirer officiellement, hier, la sonnette d’alarme.
« Mais ils sont où, mais ils sont où, mais ils sont où les… spectateurs ? ». La rengaine est désormais bien connue dans tous les stades de France. Mais elle ne fait pas rire, mais alors pas du tout, le FC Sochaux-Montbéliard. Hier matin, alors que le soleil inondait à nouveau la « pelouse » de Bonal, les dirigeants du club doubiste n’avaient pas vraiment la tête à faire bronzette. Au-dessus d’eux stagne en effet un épais nuage, noir et menaçant : les affluences qu’enregistre leur stade depuis quelques semaines. « On ne sait pas, on ne comprend pas. On est à la 6e place du championnat, toujours en lice en Coupe de France… et voilà trois matches qu’on joue devant à peine 10 000 spectateurs ! Ça faisait cinq ou six ans que l’on n’avait pas vu ça », constatait bien malgré lui François Loréfice, directeur marketing et communication du FCSM. En 2006, la réception de Lille, alors second, avait déjà donné l’alerte : seulement 12 397 personnes s’étaient retrouvées à Bonal, alors que l’équipe avait l’occasion de prendre la place de dauphin de Lyon. Or, depuis 2007, cette chute vertigineuse des affluences se confirme dans d’inquiétantes proportions.
On fait des efforts
Avec 9903 spectateurs face à Sedan, 10 477 contre Rennes, et seulement 8000 places vendues pour le match Sochaux — Le Mans de samedi, l’heure est grave… Certes, ces équipes, avec tout le respect qu’on peut leur porter, ne sont guère « sexy ». On peut aussi évoquer, pour expliquer cette désaffection soudaine, le climat guère encourageant (encore que…), les places trop chères, ou la circulation devenue difficile à Montbéliard les soirs de match. Des vieilles rengaines qui ne convainquent plus grand monde. « Cette saison, il y a du spectacle, le stade n’est pas moins confortable, et le prix moyen d’une place, chez nous, est de 13,23 E, et se trouve dans la moyenne basse au niveau français, reprend Loréfice. De plus, on a installé des écrans géants, on fait des efforts pour animer le stade ». Mais rien n’y fait : l’affluence moyenne dans l’enceinte du FCSM affiche un niveau historiquement bas (voir ci-dessous).
On ira là où le public va nous pousser
« Les tarifs ne sont pas excessifs, estime William Matter, supporter devant l’éternel des Sochaliens. C’est dommage, parce que dans le coin, on n’a pratiquement que ça… Pour moi, les 8000 qui seront là face au Mans, ce sont les fidèles qui étaient déjà présents dans l’ancien Bonal. Mais pour chauffer le stade avec si peu de monde, ça va être compliqué ! ». Voilà, en effet, la principale préoccupation des têtes pensantes du FCSM. S’ils s’inquiètent des gradins désespérément vides depuis deux mois, ce n’est pas une question d’argent, ou si peu. La billetterie représente 8 % du budget global, et n’est pas placée au rang des priorités. « Ce sont plutôt les joueurs qui commencent à venir nous voir, en nous disant qu’ils ne sentent plus poussés, plus soutenus », assure François Loréfice. « Je ne suis pas pessimiste de nature, mais j’aimerais qu’on prenne conscience qu’il en va de la survie du FCSM en Ligue 1, lâche même Jean-Claude Plessis. De toute façon, moi, je dis que si on a un public qui nous pousse vers le haut, on obtiendra une place européenne. On ira là où le public va nous pousser ». Le problème est que ce public, justement, s’essouffle véritablement, mis à part les « Ultras » (Joyriders…) qui s’époumonent jusqu’à plus d’air. Si les affluences baissent, le nombre d’abonnés a également chuté en début de saison, tout comme le nombre d’adhérents au « Supporter Club », qui tente malgré tout d’animer Bonal avec ses moyens. « Le président a toujours eu une volonté d’avoir un stade populaire et garni, rappelle Loréfice. Alors, s’il y a une adaptation à effectuer, au niveau des tarifs ou autre, on la fera ». En attendant, il y a une saison à terminer, et d’ambitieux objectifs à atteindre. Aux supporters de jouer, donc, afin de répondre au vœu sincère de Teddy Richert : que Bonal « ne soit pas un chaudron, mais… une petite marmite ! ».
Billetterie : ça continue…
Les billetteries pour les matches Sochaux — Le Mans (ce samedi à 20 h) et Sochaux — Paris SG (mercredi 28 février à 21 h) se poursuivent évidemment aujourd’hui. Concernant la rencontre face aux Sarthois, à peine plus de 8000 places avaient été vendues hier soir. La boutique « Planète FCSM », les points de vente délocalisés, le site internet (www.billetfcsochaux.fr) et le téléphone (08.92.70.12.25) sont disponibles, et vendent les places dont les tarifs oscillent entre 9 en populaires et 30 en présidentielles. Concernant la rencontre face aux Parisiens, les abonnés sont pour le moment prioritaires, et ont jusqu’à lundi prochain, au soir, pour acheter leur place habituelle. Dès mardi 20 février, tout le monde pourra se procurer les tickets, avec une fourchette de prix comprise, là encore, entre 9 et 30.
Alain Perrin « L’important, c’est ceux qui sont là ! »
L’entraîneur sochalien, s’il souhaite évidemment un plus large soutien populaire, appelle surtout les supporters à mettre de l’ambiance à Bonal.
Alain, il n’y aura pas grand monde au stade samedi soir. Est-ce dommageable pour votre équipe ?
On a vu le public de Lens pousser très fort, dimanche dernier, derrière son équipe, et ça aide forcément. Nous sommes actuellement dans une période difficile, mais l’important, c’est ceux qui seront là dans les tribunes ! Qu’ils soutiennent notre équipe, parce qu’elle se bat, et mérite leurs encouragements.
L’apport du public peut vraiment vous aider à faire basculer certains matches ?
Oui, je me souviens par exemple du match contre Nancy fin décembre. Le public avait été un élément-moteur en deuxième mi-temps, il y avait une formidable ambiance. Oui, le public est capable de forcer la décision, surtout dans les fins de matches.
Les joueurs se plaignent-ils du manque de soutien ?
Non, les joueurs n’ont pas d’état d’âme par rapport à cela. On sait qu’ils apprécient le soutien du public, et bien sûr qu’on souhaite toujours qu’il y ait plus de monde. Mais le plus important, encore une fois, c’est que les personnes qui sont là au stade nous soutiennent.
Pourquoi ?
Mais où est le problème ? Le plus inquiétant, oui, c’est qu’il n’y a pas d’explications rationnelles quant à l’amorce de la baisse d’affluence au stade Bonal. On ne sait même pas s’il y a lieu de s’inquiéter franchement de la situation. Entre la petite baisse, mais constante, du nombre d’abonnés, les déplacements parfois annulés, la moyenne de spectateurs en légère régression, le manque d’engouement, tout simplement, on ne peut établir qu’un constat global. C’est tout. Mais surtout, il n’y a rien qui permette de dire que quelque chose fonctionne moins bien qu’avant. Rien. Ni le prix des places, ni la circulation, ni les animations, ni le jeu proposé, ni le classement, rien de rien ! Cela dit, il faut souligner qu’au niveau du foot régional, on peine désormais à avoir 20 spectateurs payants pour un match de Division Honneur… Fesches, Belfort, Bart, Grandvillars, par exemple, ne jouent plus que devant une poignée de fidèles, sans qu’il y ait des explications totalement plausibles. Là, la courbe tend régulièrement, depuis une ou deux décennies, vers le « zéro ». La télévision proposant désormais du ballon rond, presque 24 heures sur 24, est-ce le trop-plein de foot difficilement compatible à une saine vie conjugale, qui nuit à l’affluence dans les stades en zone de moins forte densité de population ? Peut-être, un peu. N’oublions pas non plus qu’il y a 10 ans en arrière, une moyenne de 6000 spectateurs à Bonal, c’était bien ! Cela ne donne pas de remède, mais cela rassure un peu.
Réagissez !
Sébastien Daucourt
Le Pays Fevrier 2007