440 réponses à ce sujet

[Pierre_Minus]

Pour moi, c'est bien un coup bas car donné sous le nombril. Disons qu'il y a deux phalanges au niveau de la ceinture (la ceinture "anatomique", pas celle du short) et 3 autres en dessous.

Je pense que la souffrance d'Usyk n'est pas feinte (il s'écroule immédiatement) et que si l'arbitre l'avait compté il ne se serait pas relevé à temps. Dubois aurait gagné par KO. Et ça aurait été au moins aussi controversé.

Ça se joue à quelques centimètres, chacun peut y voir un peu ce qu'il veut, mais ce qui me conforte dans ma thèse du réel coup bas, c'est qu'un boxeur KO sur un coup dans le ventre, donc sur les abdos, donc sur un muscle, je ne me rappelle pas avoir vu ça.

C'est peut-être là-dessus que s'appuie l'arbitre pour juger le coup bas (impossible à juger à l'œil nu). Il y a aussi la délicate perspective de déchoir un champion invaincu sur un possible coup bas ... dans le doute il préfère "reset" le combat. Ce qui peut se comprendre.

On a vu beaucoup de KO au foie bien sûr, ou plus haut au plexus. On a vu des cotes cassées etc. Tout cela arrive car il s’agit de points vitaux ou ultra sensibles non protégés. Mais se retrouver plié en 2 de douleur pendant 2 minutes sur un coup dans le ventre, être mis KO comme ça, je ne m'en rappelle pas (je parle d’un vrai KO, pas d’une ”simulation” commise par un gars cherchant une porte de sortie).

[Le pote au laid]

Ça se défend.
Force est de reconnaître que la décision n'était pas simple à prendre et qu'à l'instar d'une action litigieuse dans une surface de réparation, le fait d'être le tenant du titre et d'évoluer dans un stade tout acquis à sa cause a peut-être fait pencher la balance.

[Pierre_Minus]

Ce serait siffler penalty à la 90+8 sur la foi d’images illisibles.

Ou, encore mieux car cela soulignerait le caractère irréversible de la décision, ce serait comme accorder un but en or, sans VAR, alors que l’action est émaillée d’un contact ultra litigieux ou d’une possible main, sans que ce soit parfaitement clair.

Le fait de ne pas siffler empêche peut-être une équipe de gagner dans l’instant, certes. Mais d’un autre côté, ne rien siffler ne précipite la défaite de personne. En bref, quand on ne sait pas vraiment ce qui s’est passé, faire comme si rien ne s’était passé est probablement la meilleure décision à prendre. Celui qui s’estime lésé pourra toujours se refaire.

J’ai trouvé Dubois très peu combatif et très peu agressif compte tenu de ses caractéristiques et de l’importance énorme qu’avait ce combat pour la suite de sa carrière. Sans être nul, et sans être archi dominé à chaque round, il n’en a pas fait assez. Il avait déjà eu beaucoup de ”chance” de se retrouver à combattre pour une ceinture alors que d’autres le méritaient davantage.

Le fait qu’il ait attendu que l’arbitre compte 9 et demi avant de se relever, pour moi est un abandon qui ne dit pas son nom. Il n’a pas vraiment été mis KO, il a juste décidé qu’il en avait marre.

Alors oui il y avait un écart de niveau et Usyk avait passé la seconde alors que lui commençait a accuser le coup (alors qu’il a 11 ans de moins !). Donc on peut se dire qu’il a eu raison d’arrêter les frais. Mais c'était un championnat du monde et il n’aurait pas eu la partie plus facile face à beaucoup d’autres.

Bref, Dubois n'a pas un gros mental (relativement bien sûr; mais on est chez les surhommes, les standards sont élevés). Et comme en plus, il n’a pas de menton, on n’a sans doute pas assisté à la dernière défaite de sa carrière.

La catégorie des poids lourds est souvent critiquée, car comparée aux générations d’avant qui ont vu défiler des légendes. Mais perso j’aime bien cette catégorie, derrière les deux champions il y a 10 ou 12 boxeurs aux caractéristiques très différentes, et donc des tas de combats potentiellement très intéressants à voir.

[Pierre_Minus]

Ce soir a lieu la revanche entre Zhang et Joyce en poids lourds. À ne pas rater !

[Pierre_Minus]

C’est déjà fini, victoire de Zhang, KO 3eme round. Probablement le KO de l’année d’ailleurs. Pffff hallucinant, j’en ai le souffle coupé !

[Pierre_Minus]

Combat de folie hier soir à Sheffield. Un championnat du monde des poids plumes (126 livres, 57 kilos) entre deux Anglais.

Leigh Wood, 35 ans, champion en titre, originaire de Nottingham, qui a éclos sur le tard ; et Josh Warrington, 33 ans, originaire de Leeds, ancien champion longtemps invaincu.

Pratiquement chaque ville anglaise a son champion local et d’une manière générale, les ”domestic fights” génèrent un engouement qu’on ne retrouve que très peu ailleurs. A Leeds, Manchester, Sheffield, Liverpool, on remplit plutôt facilement une salle de 10.000 personnes pour ce genre d’affiche.

Et chez les poids lourds, bien évidemment autrement plus connus du grand public, c’est encore un autre délire puisque des Fury ou Joshua remplissent carrément Wembley.

Pour ceux qui veulent voir un gros KO, c’est à 6 minutes 15. L’enchaînement est dingue mais tout le combat est haletant. Jusqu’ici Wood avait été dominé par un Warrington qu’on pensait sur le déclin mais qui a peut-être disputé son meilleur combat. Pas hyper précis, ni propre, mais une agressivité et un volume impressionnants.

https://m.youtube.co...eature=youtu.be


Wood n’en est pas à son coup d’essai. Il s’était déjà fait connaître en mettant KO de façon très spectaculaire l’Irlandais Conlan après avoir retourné un combat très mal engagé. Dommage qu’il ait 35 ans et donc peu de combats devant lui.

[Shogun]

Joli combat, même si je n’aime pas trop la gueule de Wood.

[Pierre_Minus]

Un des beaux combats de l’année de par son intensité.

Il y en a eu un autre ce week-end, entre l’Australien Tim Tszyu (fils de Kosta, boxeur-puncheur ayant animé la fin des années 90) et le latino-americain Mendoza. C’était en super-welters (154 livres, 69 kilos).

Les catégories "super-” sont les plus récentes en boxe. Super-coqs, super-plumes, super-légers, super-welters, super-moyens ... elles n’ont globalement pas le prestige des catégories historiques que sont donc les plumes, légers, welters, moyens. Les poids lourds étant totalement à part à tous les niveaux.

Peut-être est-ce dû, en partie, au fait qu’aux US on les appelle différemment. Un super-welter par exemple est un ”junior middleweight”. Autrement dit, pas un ”gros poids welter", mais un ”petit poids moyen”. Comme si ce boxeur était considéré dans l’antichambre d’une ”vraie” catégorie.

Possible donc que ces appellations différentes ajoutent à la confusion et nuisent au prestige de ces boxeurs considérés un peu comme des ”apprentis”. Sauf quand ils sont américains bien sûr comme Jermell Charlo (qui s’est déconsidéré il y a peu mais bref on en reparlera).

Tszyu et Mendoza sont deux très bons boxeurs, généreux et spectaculaires, qui auront pourtant toutes les peines du monde à réellement attirer les foules.

La solution pourrait être, pour Tszyu notamment, de monter de catégorie et boxer chez les poids moyens. Catégorie historiquement prestigieuse, aujourd'hui pourtant faible et dominée par un Kazakh qui possède le triple défaut de ne pas parler anglais, d’avoir nom imprononçable par le public US (Alimkhanuly) et, enfin, d’être un peu trop dangereux pour ses éventuels concurrents en quête de titre mondial (il possède 2 ceintures sur 4 depuis ce week-end).

L’Anglais Chris Eubank Jr, autre ”fils de”, classé 1er de la caté des moyens, ne cherche d’ailleurs même pas à combattre ce Kazakh dont tout le monde se fout. C’est dangereux et pas assez rémunérateur. L’adversaire qu’il a en ligne de mire est Conor Benn, fils de Nigel, évoluant 2 divisions en dessous. Leurs papas respectifs s’étant affrontés il y a une trentaine d’années, on tient là un probable autre ”domestic fight” qui générera des millions en Angleterre et remplira les poches de deux boxeurs, globalement, de seconde catégorie.

Il faut être un boxeur de très, très, très haut niveau pour percer si vous êtes né dans le mauvais pays.

[Le pote au laid]

Je n'ai pas vu le combat mais j'attends l'avis de PM sur le résultat controversé du duel Fury/NGannou.
C'est quand même sacrément perturbant. Imaginez le 15 du Stade Rochelais qui viendrait faire jeu égal au foot avec le PSG...

[Pierre_Minus]

J’ai vu un Ngannou extrêmement bien préparé, athlétiquement bien sûr mais aussi, voire surtout, stratégiquement, et c’est cela qui m’a vraiment surpris. Il n’est pas venu essayer de toucher Fury d’une grosse droite sur un coup de bol, non non, il est venu boxer, au sens technique, pugilistique, du terme, et gagner. Fury lui est venu les mains dans les poches prendre un gros paquet de pognon.

Et en fait tout se joue déjà là, dans l’état d’esprit avec lequel les 2 gaillards ont appréhendé le combat. Ngannou est venu combattre, Fury faire une exhibition. Le premier a été un digne ambassadeur de son sport, de son public. La communauté MMA peut être fière de Francis. Le second a ”embarrassé” les amateurs de boxe, hormis bien sûr ses fans qui par définition lui trouveront toutes les circonstances atténuantes du monde.

Ngannou à été étonnant dans sa capacité à neutraliser le jab de Fury. Il a cherché à avancer, à toucher Fury au corps. Dans ces cas-là, quand Fury n’arrive pas à boxer un gars avec son jab, quand il ne peut gérer la vitesse et/ou la distance, il finit généralement par lui rentrer dans le lard, à boxer ”dirty”, salement, collé au type, jouant de son poids dans les accrochages, en lui mettant des coups illégaux, de coude notamment. Il l’a fait hier soir, ce qui prouve en soi qu’il était réellement sans solutions. Le champion du monde des lourds réduit à envoyer des coups de coude à un adversaire dont c’est le 1er combat de boxe pro ! Consternant.

Le truc c’est que Francis est un monstre physique ayant en plus, logiquement via le MMA, des aptitudes de lutteur. Donc même dans ces phases un peu dégueulasses Fury n’a pas pris le dessus.

Il s’est sorti de ce bourbier grâce à ces 2 derniers rounds dans lesquels Francis n’a rien fait, rincé qu’il était après un 8eme round de totale domination (ce qui est encore plus choquant que le KD du 3eme round). Fury a été je crois, décontenancé dès le 1er round, ensuite il y a le KD au 3eme et là ben ça gamberge, ”bordel mais il est venu combattre ce con”, en face il y a un tronc d’arbre aux capacités de boxeur bien meilleures que prévu ...

(Un truc que Fury fait souvent aussi, c’est passer en gaucher. Problème, Ngannou le fait aussi ... ce qui prouve que le gars sait boxer. Vraiment très surprenant.)

Ceci dit, pour moi, Fury gagne : c’est serré, il y a un KD, mais au pointage round par round il gagne à mon avis. En 12 rounds ça aurait été plus net (même si là encore c’est un peu triste de sortir cet argument, normalement ça doit faire 10 rounds à zéro). C’est une victoire sans aucun panache qui résonne comme une défaite et le principal intéressé en est parfaitement conscient. Ngannou est le vainqueur moral.

On a frôlé le séisme. Mais Fury est toujours tout à fait capable de battre n’importe quel autre poids lourds, et Ngannou se faire outboxer par un poids lourds qui se serait honnêtement et sérieusement préparé. J’allais écrire ”n'importe quel poids lourds” mais finalement je n’en suis pas sûr et c’est difficile de prendre Francis de haut désormais !

Ceci dit ce n'est que mon sentiment. C’était certes un événement, mais qui doit son déroulement aux 2 personnalités très particulières qui l’ont animé. Bien sûr des tas de gens vont s’emballer et lancer des constats définitifs sur le déclin de la boxe, désormais supplantée par le MMA etc. Et ça peut se discuter, mais pas sur les bases de ce combat-qui-ne-devait-pas-vraiment-en-être-un.

En fait c’est surtout le prochain combat des deux gaillards (Francis s’étant ouvert en grand les portes du Boxing business, il est possible qu’on le revoie dans un méga fight rémunérateur) qui nous en dira davantage sur ce que recèle vraiment ce combat. Comme souvent d’ailleurs en boxe.

[Le pote au laid]

Merci pour ton analyse, comme toujours très complète.

[Pierre_Minus]

En fait, je suis passé par plusieurs stades :

- au milieu du 2eme round, je me disais que Fury en faisait trop. Pour moi, le scénario du combat tel que je l’avais imaginé, c’était un Gipsy King jouant la comédie pendant 5 ou 6 rounds, donnant l’impression d’être dans le dur, histoire que les payeurs (le combat était en pay per view) et les organisateurs en aient pour leur argent.

- Puis vient le KD au 3eme round, sur un coup à la tempe qui ne semble pas si violent. Donc là j’hésite : la tempe est évidemment un endroit très sensible, et aussi, Fury est déjà allé plusieurs fois au tapis dans sa carrière, et pas seulement contre des gros puncheurs. De plus, jouer la comédie, ok, mais de là à simuler un Knock-Down ... mais bon c’est Fury, donc j’hésite toujours, je me dis que la simulation est possible. Honteuse et ridicule si avérée, mais possible.

- Le combat se poursuit et toujours aucun vrai ajustement de Fury, qui ne maitrise rien, alors qu’il possède pourtant un QI boxe très élevé et a toujours su s’adapter quand les choses se passaient mal. Et là il n’y arrive pas, alors qu’en face, il a certes un Ngannou meilleur que prévu, mais qui n’a jamais boxé en pro. Jamais. C’est son faciès, et celui de l’assistant-coach Andy Lee, qui me font alors réaliser que quelque chose ne va pas, vraiment pas.

- Je penche alors, à la mi-combat, pour l’hypothèse du Fury encore bourré de la veille, voire carrément camé, sous coke. Oui oui, je n’y croyais tellement pas, c’était tellement gros (je parle du déroulement du combat) que je me posais la question.

- Arrive le 8eme round et Francis lui passe un bouillon, certes Fury n’est pas durement touché mais il est largement dominé. Il ne reste alors que 2 rounds.

- 9eme et 10eme round, il ne se passe quasiment rien. Francis est rincé, Fury empoche les rounds en lançant quelques jabs. Étant le champion, ces rounds lui seront donnés. Le challenger doit toujours, toujours faire + que le champion pour gagner, c’est l’usage, une règle non-dite, spécialement dans les derniers rounds du combat, qu’on appelle ”championship rounds” - c’est un peu l’équivalent du ”money time” en basket.

Arrive la décision. Elle met quelques temps à arriver je trouve (suspense pour le show ? Peut-être). À ce moment-là je me dis que ça va accoucher d’un nul, car c’est ce que l’impression globale du combat me renvoyait. Mais on pointe bien round par round, et non selon une impression globale (d’où certaines incompréhensions quelques fois). Et 2 juges sur 3 donnent Fury vainqueur, 6 rounds à 4 ou 7 à 3. Le dernier juge voit un 5-5, mais avec 1 point de plus pour Ngannou grâce au Knock-Down ...

Bref victoire du Gipsy King et là, ben c’est un ”ouf”, car même si Ngannou m’est autrement plus sympathique que Fury, voir le champion du monde des poids lourds perdre contre un boxeur néophyte, ça la fout mal dans la mesure où ça discrédite, aux yeux du grand public, absolument tous les adversaires/rivaux de Fury, passés, présents et à venir... je veux dire, que le gros Fury se ridiculise, je m’en fous un peu, mais que ça touche les autres, ça m’aurait fait chier.

[Pierre_Minus]

Le plus embêtant dans tout cela, c’est que Fury n’en sort pas 100% indemne et que le combat qui devait l’opposer à Usyk le 23 décembre a de très grandes chances d’être repoussé.

On peut d’ailleurs s’interroger sur le choix de cette date, 2 mois seulement après un combat d’exhibition qui même s’il n’avait pas été compétitif, comportait une part de risque (il aurait suffi par exemple d’un choc de têtes et quelques points de suture, ou une mauvaise blessure en préparation, etc).

On peut donc très bien soupçonner Fury d’une nouvelle entourloupe. Une revanche contre Ngannou mobiliserait aujourd’hui bien plus les foules (et donc engagerait bien plus de pognon) qu’un combat d’unification totale contre Usyk qui n’intéresserait, en gros, que les fans de boxe. Lesquels seront toujours largement moins nombreux que le grand public en recherche d’entertainment pur.

En bref :

- soit Fury n’a jamais eu l’intention d’affronter Usyk et ce combat contre Ngannou est bel et bien une mascarade destinée à planifier une revanche hautement rémunératrice (le pognon étant le moteur N°1 de Fury); les rieurs pourront parler de théorie du complot, les suiveurs de la boxe pro se garderont bien de totalement écarter l’hypothèse. L’enfumage est toujours possible, particulièrement quand Fury est dans les parages.

- soit ce combat devait, dans son esprit, réellement être une formalité et, devant l’opposition inattendue de Francis, notre Gipsy King a tout simplement eu peur de prendre un mauvais coup qui l’aurait potentiellement diminué en vue du 23 Décembre. Ne pas oublier que c’était le premier combat de Ngannou : comment se préparer face à un adversaire qui n’a jamais combattu ? Comment étudier ses combats, puisqu’ils n’existent pas ? La théorie de l’effet de surprise tient tout autant.

Le promoteur de Joshua, Eddie Hearn, en a remis une couche au sujet de Fury, dans des termes peu flatteurs. Probablement en vue de placer son poulain, soit contre Ngannou pour en quelque sorte ”laver l’honneur de la boxe”, soit contre Fury pour lui donner l’opportunité de rétablir une réputation forcément entamée.

À partir du moment où on trouve une belle histoire à raconter, on peut monter n’importe quel combat. Y compris pour un boxeur tout près d’être has been tel que l’est Joshua, dont la dernière victoire convaincante remonte à 4 ou 5 ans.

Il s’est passé pas mal de choses cette année. Mais le monde des poids lourds est complètement à part. L’amplitude des combats, l’aura des boxeurs, les sommes mises en jeu ...

Comme le dit un Youtubeur boxe américain, il y a deux catégories de boxeurs. D’un côté, il y a le champion du monde des lourds; et de l’autre, il y a ”everyone else”.

[Shogun]

Il a un physique assez incroyable le champion. Une grande carcasse, gras du bide, suffisamment gras des bras pour ne révéler aucun muscle, le tout monté sur 2 cannes à pêche en guise de jambes.

[Pierre_Minus]

Oui aucune allure avec ses jambes en X et son gros bide (il a déjà été bien plus gros que ça y compris sur le ring). Et pourtant il est aux yeux de beaucoup le ”vrai” champion des poids lourds, en tant que ”lineal champ’”.

Pour comprendre qui est le lineal champ’, pas compliqué : vous prenez le 1er champion des lourds de l’histoire, puis son vainqueur, puis le vainqueur du vainqueur, puis le vainqueur du vainqueur du vainqueur ... bref vous remontez la chaîne jusqu'à nos jours et vous obtenez le lineal, un genre de champion héréditaire en quelque sorte. Autant dire que dans cette liste, il y a du lourd. Titre symbolique mais on sait que les symboles, dans certains sports, pèsent lourd. Surtout que la boxe compte 4 fédérations, donc potentiellemet 4 champions du monde par catégorie ... c’est un moyen plus ou moins bancal de les départager, déterminer qui est le vrai. Car il en faut un, n’est-ce pas.

Fury est champion d’Angleterre en 2011 face à Derek Chisora. C’est un titre qui compte, sans commune mesure avec celui de champion de France ou d’Allemagne, mais il n’est qu’un jeune prospect parmi d’autres, notamment comme Chisora (lequel est lui aussi toujours en activité).

Il connaît son 1er accroc en 2013 contre Steve Cunningham à l’occasion de (je crois) son premier combat aux USA.

Cunningham vient des lourds-légers et monte sur le ring avec 20 kilos et 20cm de moins que Fury. Celui-ci, qui a encore des cheveux à l’époque, commence le combat en mariole, joue au boxeur stylé, fait des grimaces, provoque ... sans doute veut-il faire le show pour impacter le public US. Problème, Cunningham, boxeur expérimenté et techniquement au point, le domine et le cueille même sur un crochet au 2eme round. Fury au tapis ! Là, fini de rigoler, il enclenche le mode dégueulasse (c’est vraiment pas beau à voir), rentre dans la gueule et bully complètement Cunningham qui, au sens strict, ne peut faire le poids.

C’est un combat très important pour mieux saisir quel combattant est Fury. Or je suis à peu près persuadé que 80% des mecs qui se disent fan de Fury ne l’ont jamais regardé.

La suite, c’est un titre européen remporté, une nouvelle fois contre Chisora, et le combat contre Klitschko, champion du monde alors invaincu (et, important, detesté de très nombreux fans de boxe) depuis une dizaine d’années. Un combat chiant à mourir, au rythme inexistant, dans lequel Klitschko ne tente absolument rien, complètement décontenancé par cet Obelix qui gère parfaitement distance et déplacements. Un gaillard de 2m06 120 kilos qui bouge comme un poids moyen, wow ! Il y a de quoi être surpris. Cette image de type hors-normes, unique, qui défie les lois de la nature, bref de prodige, est pour beaucoup dans son aura (outre sa grande gueule et son indéniable don pour la punchline).

Bref, celui qui sera bientôt le Gipsy King ”shock the world”, mais est quelques temps après contrôlé positif (à la cocaïne nous dit-on) et disparait du même coup des écrans radars ... pendant 3 ans.

On tient là un 2eme point important : il ne donnera donc JAMAIS sa revanche à Klitschko, tout comme Ali n’avait jamais donné de revanche à Foreman. Fury retraité précoce, c’est Joshua qui vaincra Klitschko pour l’obtention des ceintures vacantes.

Fury revient donc 3 ans après, donne des interviews en expliquant qu’il a sombré dans la dépression, pensé au suicide. Il pèse alors 150 ou 160 kilos, dit être monté à 180. Il se refait une santé (selon ses standards ...), tape 2 journeymen de niveau européen, et obtient très vite une chance mondiale face à Deontay Wilder. A l’époque, celui-ci détient 1 ceinture, Joshua les 3 autres (jamais ils ne s’affronteront).

Wilder a alors mis tous des adversaires KO mais souffre d’un manque de reconnaissance : on lui reproche, outre d’être un boxeur extrêmement limité, de n’avoir battu personne, d’éviter les vrais durs. Bref, d’être un imposteur. Prendre un Fury à l’aura certaine, qu’on pense logiquement encore très loin de son meilleur niveau, lui permettrait donc d’accrocher à son palmarès un ex-champion du monde des lourds. Tel est le (mauvais) calcul de Wilder.

Fury dominera Wilder durant tout le combat, qui pourtant se soldera par un nul. Fury va au tapis au 12eme round mais se relèvera, sous le regard incrédule de Wilder (et de millions de fans). Tout le monde connaît cette scène.

S’en suivra deux autres combats, bien plus violents, remportés par Fury. Une trilogie de légende.

Et ... c’est à peu près tout. Fury a, depuis, battu une 3eme fois Chisora dans un combat aux airs de sparring-partner qu’absolument personne n’attendait. Battu aussi Dillian Whyte, éternel prétendant au titre qui ne proposera strictement rien ce soir-là et finira KO au 6eme. Deux Anglais combattus en Angleterre devant une foule énorme.

On peut ajouter le Suédois Wallin, juste avant Fury-Wilder 2. Wallin est un peu sous-coté, chiant à boxer, gaucher, au style élusif. Fury ne pouvant le boxer, salement coupé au front (il a frôlé l’arrêt par le médecin et donc la perte de ses titres ce jour-là), il passe en mode bourrin/lutteur/bagarreur comme contre Cunningham et l’emporte à l’arrache.

Si on fait les comptes, en essayant d’être à charge et à décharge :

- il a battu un Klitschko invaincu depuis des plombes. Mais un Klitschko lui-même discuté, voire contesté, voire détesté, car régnant sans aucun panache sur une catégorie alors extrêmement pauvre qualitativement. Et, encore une fois, il n’y a jamais eu de revanche.

- il a battu Wilder 3 fois (même si les juges ont décidé autre chose au 1er combat). Mais là encore Wilder est très, très discuté, voire moqué pour son style déguigandé, sa défense et son équilibre inexistants, etc. Et Wilder, comme Klitschko, n’a pas rencontré d’opposition de vrai niveau mondial hormis le Cubain Ortiz (qui le dominait largement avant de se faire atomiser par ce qui est la plus grosse droite de la catégorie).

En termes de résumé, c’est tout. Pour beaucoup, c’est suffisant. Pour d’autres, au moins aussi nombreux, ce n’est pas assez pour prétendre au statut que les premiers lui prêtent, qui va de ”top 5 all time” à ”plus grand de tous les temps” - GOAT comme on dit en 2023.

[Pierre_Minus]

Certes Fury n’a pas affronté ”tout le monde” comme on dit. Mais tous les boxeurs mesurent le ratio risques/bénéfices au moment de choisir leur adversaire. On rêve du héros qui voudrait combattre pour la gloire, mais ce gars n’existe pas. Enfin, si, il existe, jusqu'à ce que les zéros commencent à s’aligner sur le compte en banque. On ne réfléchit probablement pas de la même façon avec 3 dollars sur le compte, que quand on a 3 millions.

Notons d’ailleurs que beaucoup, beaucoup, énormément de boxeurs pro ne vivent pas de la boxe. Ou en tous cas, n’en vivent pas largement. Une bourse de 50.000, ou 100.000, ou même 200.000 dollars (+ que ça, c’est pour l’élite de l’élite ... et Tony Yoka), c’est vite parti une fois qu’on a payé ses coachs et son promoteur. Et des bourses de ce montant, peu de boxeurs les touchent, et sûrement pas 2 ou 3 fois par an ... Joe Smith Jr, que je suis sur Instagram, a affronté de grands noms, Bivol, Beterbiev, Hopkins ... a été champion du monde. Mais ce n’est pas assez pour avoir complètement abandonné son entreprise d’espaces verts, dont il fait toujours la pub ! D’ailleurs le surnom du gars, que Hopkins lui avait donné avec mépris, est ”common man”, pour l’anecdote. Bref.

Fury a gagné 3 ceintures contre Klitschko, et la 4eme en battant Wilder. Dans son esprit, ou en tous cas son discours, il a déjà possédé les 4 ceintures (pas en même temps) et n’a donc plus rien à prouver. Ce qui compte désormais c’est s’en mettre un max dans les poches avant la retraite.

C’est un discours qui se tient, objectivement. Certes une grande victoire contre un Joshua ou un Usyk lui vaudrait de rallier un paquet de sceptiques, mais d’un autre côté beaucoup d’amateurs de boxe n'en ont jamais assez. Même les plus grands du moment sont discutés, contestés.

Terence Crawford par exemple, sort d'une victoire éclatantissime contre son rival Errol Spence. Le voilà champion undisputed chez les welters (catégorie hyper relevée) après l’avoir été chez les super-légers. Le gars a donc cumulé 8 ceintures. En 40 combats, il est evidemment invaincu, et compte 31 KO dont 11 lors de ses 11 dernières sorties - sa dernière victoire aux points remonte à 7 ans ! Le mec allonge tout le monde, voilà 7 ans que personne ne fait 12 rounds avec Terence Crawford ! C’est énorme.

Et pourtant certains lui reprochent d’éviter l’étoile montante Jaron Ennis. Il faudrait que Crawford le batte, et ainsi (disent-ils), il assoirait définitivement sa ”legacy”, la trace qu’il laissera dans le sport. Bien évidemment ils ne changeront pas d’avis. La gueule de Crawford ne leur revient pas, c’est aussi simple que ça. Pourquoi ? En partie parce que Spence a beaucoup de fans ... Ils veulent pouvoir dire ”voyez, je vous l’avais dit, le mec n’est pas si fort que ça”. Ou alors, pour d’autres, ”il est bien moins fort que mon chouchou à moi”, lequel chouchou change bien sûr de nom et de faciès dès qu’il perd. La mauvaise foi de certains fans de boxe laisserait pantois le South Winner le plus acharné.

Et c’est la même chose avec Canelo dont on dit qu’il esquive Benavidez, et que seule une victoire contre celui-ci mettrait fin aux débats concernant son réel niveau. 60 combats, des ceintures à la pelle, un tableau de chasse sans égal. Mais non, là encore ça suffit pas.

Joe Joyce il y a 6 mois, était considéré comme un monstre qui allait rouler sur tout le monde chez les poids lourds. On reprochait à Fury de l’éviter. Après 2 défaites contre Zhang, ça y est, on le dit unidimensionnel, limité. Bien qu’il soit toujours en mesure de ratatiner 90% du plateau, Joyce est un has been ! Et le Chinois lui a piqué la place de boogeyman-de-la-division-que-tout-le-monde-évite. Bien sûr il demande à combattre Fury, le gars qui a la ceinture et un billet de 10 millions sur le front (Usyk a + de ceintures mais le billet est bien moins gros). Bien sûr, on reproche à Fury de l’éviter. Et bien sûr, si Zhang parvient à choper ces 10 millions, on lui reprochera d’éviter tout le monde et de n’avoir battu personne sinon Joyce-le-limité et Fury-le-surcoté. Et bien sûr si Fury gagne il n'aura battu qu'un type de 40 piges n'ayant battu qu'un Joyce limité ... que l'on aurait pourtant voulu voir Fury affronter 1 an plus tôt. Aujourd'hui plus personne ne demande ce combat contre Joyce, que Fury a en quelque sorte gagné sans monter sur le ring. 

[Shogun]

Toi t’as vraiment la passion communicative. Merci PM.

[Choux]

Carrément, c'est passionnant mec! TU es passionnant.

[Le pote au laid]

Sans nul doute, PM est le monsieur boxe de PS !

[Pierre_Minus]

Merci, en réalité je me disais que j’en faisais un peu trop avec ces longs posts à rallonge abordant quelques fois 3 ou 4 sujets différents. Mais c’est probablement ce sport qui veut ça. Trop de choses imbriquées, de projections, de combats potentiels à venir (plausibles comme hypothétiques voire carrément purement fantaisistes) ... une petite vingtaine de catégories de poids chacune ”divisée”, ou divisable, en 4 fédérations, WBC, WBA, IBF, WBO. Etc etc. Une usine à gaz.

Et c’est ça qui est excellent. On se dit que pour pouvoir s’intéresser à ce bordel, essayer de comprendre les rouages du boxing business, il faut être sacrément passionné. He bien non même pas, car c’est en soi passionnant. On n’a ça nulle part ailleurs, dans aucun sport. Le foot, le tennis, le rugby etc ont leur fédérations, leurs magouilles, leurs dopés, leurs scandales. Mais à l’arrivée on a toujours un championnat, ou un tournoi. Des classements obtenus via des victoires, des nuls, des défaites etc. Il y a un premier, un deuxième, etc.

On parlait des poids lourds. Voici les classements des différentes fédérations à ce jour :

WBC Champion : Tyson Fury.

1. Deontay Wilder
2. Anthony Joshua
3. Arslanbek Makhmudov
4. Frank Sanchez
5. Andy Ruiz

WBA : Champion Oleksandr Usyk

1. Deontay Wilder
2. Martin Bakole
3. Anthony Joshua
4. Arslanbek Makhmudov
5. Lenier Pero

IBF : Champion Usyk

1. Filip Hrgovic
2. Otto Wallin
3. Anthony Joshua
4. Deontay Wilder
5. Frank Sanchez

WBO : Champion Usyk

1. Anthony Joshua
2. Jared Anderson
3. Frank Sanchez
4. Andy Ruiz
5. Deontay Wilder


Aucune trace de Joyce, Zhang dans les 5 premiers des 4 fédérations. Ce qui signifie qu’ils ne seront pas les premiers, ni même les deuxièmes, etc, à qui on proposera un championnat du monde. Sauf si bien sûr un gros paquet de pognon tombe du ciel (ou de Pékin).

À ces classements s’ajoutent, officieux, ceux du site Boxrec (un peu bizarre aussi car géré par des algorithmes, mais préféré par le public) ou de Ring magazine.

Joshua n’a battu aucun boxeur du top 10 depuis 4 ans, c’était Ruiz.
Ruiz n’a battu personne du top 10 depuis 4 ans, c’était ... Joshua. Ah si il y a eu le Cubain Ortiz, 69 ans.
Wilder n’a battu aucun membre du top 10, tout court, hormis Ortiz qui décidément n’a pas de bol.
La victoire la plus significative de Makhmudov est celle obtenue contre Carlos Takam, qui navigue autour de la 25eme place mondiale.
Jared ”big baby” Anderson est encore jeune, il est un des prospects dont on attend le plus. Pareil, sa victoire la plus significative n’est pas forcément retentissante (contre Charles Martin, certes ex-champion éphémère mais le genre de champion dont on se demande comment il a pu l’être, aujourd’hui pas loin de 40 piges et 30 ou 40eme mondial).
Même chose pour le Cubain Sanchez, encore pire pour son compatriote Pero. Du style certes mais très peu de références.

Wallin est peut-être le moins considéré de tous mais il a fait mieux que résister contre Fury, a battu l’honnête Breazale et vient de surclasser le puncheur russe Gassiev. Pas le moins méritant de tous.

Concernant Hrgovic, c’est un peu différent dans la mesure où il a battu Zhang. Néanmoins, il était déjà bien placé avant cette victoire, qui en quelque sorte lui confère une certaine légitimité a posteriori.

Bakolé a battu Takam le week-end dernier, avait détruit Yoka, c’est pas énorme en soi mais le mec est terrifiant.

Bref un bordel assez peu lisible, globalement.

Fury et Usyk devaient s’affronter, rien n’est moins certain désormais.

Wallin-Hrgovic logiquement devrait se faire, pour déterminer qui sera le prochain challenger d’Usyk pour la ceinture IBF.

Pour le reste, entre vieilles gloires dont on commence à se lasser (Wilder, Joshua, Ruiz, Parker ...) mais encore a minima redoutables, et prospects plus ou moins jeunes n’ayant pas montré grand chose, le futur de la caté n’est pas facile à prédire. Les choses pourraient cependant bouger en 2024, Usyk ayant 37 ans, Wilder bientôt 38, Fury 35 ...

[Pierre_Minus]

Le combat entre Fury et Usyk est bien repoussé, il est désormais question d’une date en Février.

Du coup, le dernier gros combat de l’année sera l’affiche entre David Benavidez et Demetrius Andrade en super-moyens. Deux gars au parcours assez particulier.

Benavidez, bientôt 26 ans, était considéré à ses débuts comme un très grand espoir. Champion du monde à 21 ans, il a été destitué après avoir été contrôlé positif à la cocaïne. Il redeviendra champion l’année suivante mais perdra à nouveau sa ceinture, la veille de sa défense de titre, pour ne pas avoir respecté la limite de poids le jour de la pesée.

(Le fait qu’un boxeur ne fasse pas le poids ne signifie pas forcément annulation du combat; il arrive que le boxeur en faute laisse une partie de sa bourse à son adversaire en guise de compensation et hop, on monte sur le ring).

Il est revenu au 1er plan en remportant 2 victoires très impressionnantes contre le puncheur canadien Lemieux et le technicien Caleb Plant, ancien champion battu par Canelo (qui est à l’heure actuelle le champion incontesté de la catégorie).

Beaucoup voient en Benavidez LE gars capable de détrôner le petit rouquin. C’est un gros puncheur avec un gros cœur, endurant, mettant énormément de volume et de pression, frappant des deux mains. Voilà des mois qu’on reproche à Canelo de l’éviter. C’est un vaste sujet, je pense pour ma part qu’il est un peu ”facile” de demander un combat à 15M de dollars après deux victoires, aussi spectaculaires furent-elles.

Réclamer, voire mendier, un combat à Canelo, c’est aussi ce qu’a fait Andrade il y a 2 ou 3 ans. Or si Benavidez a (selon moi) encore un ou deux trucs à prouver, Andrade lui n’a carrément rien fait pour mériter son Canelo fight (synonyme de changement de vie).

Andrade a 35 ans. Lui aussi était vu chez les amateurs, comme un futur champion. Alors certes il l’a été, chez les super-welters puis les moyens. Il vient de débarquer chez les super-moyens, la catégorie des moyens n’étant probablement pas intéressante pour lui en termes de risques/bénéfices. Soit il y a trop à perdre, soit pas assez à gagner ...

Le gros problème d’Andrade est d’avoir voulu, de manière présomptueuse, jouer les ”free agent”. Autrement dit de s’affranchir de son promoteur pour gérer lui-même sa carrière, négocier ses bourses, choisir ses adversaires.

C’est assez rare en boxe. Pacquiao, Canelo l’ont fait ou le font toujours. La différence avec Andrade c’est qu’avant d’envoyer chier le boxing business, ou plutot d’en prendre les commandes, eux avaient une toute autre aura, car un tout autre palmarès/parcours.

Boo-Boo (son surnom) Andrade lui s’est vu très beau, très vite, et de fil en aiguille, de mauvais calculs en adversaires très loin de l’élite, à vouloir vendre trop cher des combats sans intérêt et éviter les vrais challenges, il a fini par désintéresser le public, donc les diffuseurs, et se mettre peu à peu hors-jeu tout seul. Il ne compte qu’un combat en 2023, aucun en 2022. Ses dernières victoires à peu près significatives remontent à près de dix ans.

Il reste néanmoins un adversaire de renom, donc plutôt intéressant pour Benavidez. Ainsi va la boxe, on mesure la légitimité d’un boxeur aux noms qui garnissent son palmarès. Quand bien même le gars soit un peu rincé, ou très peu actif comme Andrade, bref loin de son prime.

Le prono le plus évident est une victoire de Benavidez. Bien qu’Andrade soit un boxeur mobile avec de solides bases héritées de son passé amateur, on le voit mal, à 35 ans, échapper pendant 12 rounds à la pression que Benavidez est capable de mettre. Et à lui faire mal. Car celui-ci est dans SA catégorie, contrairement à Boo-Boo. Et enfin, en termes d’opposition rencontrée, il n’y a pas photo entre les deux.

Mais.

J’ai la faiblesse de croire que les gens, sauf grosse épreuve, gros coup dur, ne changent pas. Benavidez n’a pas toujours été discipliné par le passé. On sent aussi le gars un peu à fleur de peau.

Pas de quoi miser 50 dollars sur Boo-Boo ceci dit.

[Pierre_Minus]

Puisqu’on est chez les super-moyens, un petit point sur les boxeurs français, puisque dans c’est dans cette catégorie qu’évolue Christian Mbili. Il est désormais dans tous les classements, fédérations, Boxrec. Il fait son trou petit à petit. Sa dernière victoire contre l’Équatorien Gongora, environ 20eme mondial, lui a fait passer un petit cap.

Christian est un monstre physique dont le style de pressure fighter est impressionnant de prime abord. Il est dans l’affrontement, le défi physique. Émigré au Canada, il évolue le plus souvent au Casino de Montréal, ce qui n’est pas anodin car le ring y est tout petit. Cela facilite la tâche quand comme Mbili, votre objectif est de coincer votre adversaire dos aux cordes pour le bombarder.

De par son style spectaculaire, Christian fera probablement toujours un minimum recette. En termes d’ambition sportive je pense cependant, au vu de la concurrence, qu’il est déjà plus ou moins au taquet. Il se livre énormément, boxe très ouvert avec notamment de très larges crochets, et prend beaucoup, beaucoup de coups. Ça passe ou ça casse, voilà l’impression qu’il donne.

Le round 8 de son combat contre Gongora : https://youtu.be/Wkj...s1KJZkCLnKU9m6l

On le voit manger un uppercut terrifiant qui le secoue. Il en a pris 20 comme ça dans le combat, signe qu’il a quand même du mal à s’adapter, changer de plan. Face à une opposition plus mobile que Gongora (qui est le même genre de mec que lui) et sur un ”vrai” ring, ça pourrait ne pas passer.

[Pierre_Minus]

Notre seul champion en titre est Arsen Goulamirian, WBA, chez les lourds-légers (”Cruisers” en Anglais). C’est une catégorie peu médiatisée, coincée entre les mi-lourds et les poids lourds.

Je n’ai vu je crois Arsen sur le ring qu’une seule fois. Son dernier combat n’avait même pas été diffusé. Notons qu’en début de carrière il avait battu le Belfortain David Radeff pour le titre de champion de France. Il n’a pas réellement de ”noms” à son palmarès, très peu de gens le connaissent en fait.

Mais il faut dire qu’Arsen n’a combattu qu’une seule fois depuis fin 2019. 1 combat en 4 ans. Il est assez étonnant en réalité, qu’il n’ait pas été destitué. Son prochain combat sera vraisemblablement contre le Cubain Dorticos, un autre vétéran mais au palmarès plus étoffé. Ce serait un combat périlleux pour Arsen.

[Pierre_Minus]

J’aurai aussi du mal à parler de Souleymane Cissokho, bien classé chez les welters mais qui lui non plus n’a pas affronté de boxeur renommé. Même en fouillant dans le palmarès de ses adversaires on ne trouve pas de références non plus. Pas même une défaite contre un top 20 qui pourrait donner une idée. Rien.

Cissokho est regardé avec des yeux de chimène par pas mal de suiveurs français. On le dit très technique, surdoué. C’est un type intelligent, posé. Mais en France on a quelques fois du mal à assimiler ce que la boxe pro requiert. Notamment en termes de management ou de construction de carrière.

Cissokho a déjà 32 ans et évolue dans une catégorie qui certes va sans doute voir partir Spence et Crawford, mais compte encore un sacré paquet de types de très haut niveau, et qui va encore en voir arriver d’autres d’ici 2 ou 3 ans.

32 ans et seulement 17 combats ... presque tous les cadors de la catégorie en comptent au minimum le double. Ça semble inextricable. Hormis chez les Canadiens bien classés, et qui rencontrent un peu les mêmes problèmes d’exposition, on a du mal à lui trouver un adversaire potentiel capable de lui faire passer un cap.

[Pierre_Minus]

De la ”Team Solid” des Jeux de Rio on peut aussi citer Mathieu Bauderlique qui lui, a affronté un vrai boxeur de niveau mondial, l’Anglais Callum Smith. Cela s’était terminé par un violent KO en début de combat mais Bauderlique n’avait pas eu à rougir. Ce n’etait que son 24eme combaat pro, le 4eme seulement prevu en 12 rounds (oui, parler du nombre de combats pro, c’est bien, mais au début on commence par 4 rounds puis 6 puis 8 puis 10 puis 12. Tout ne se vaut donc pas). Depuis, c’est silence radio, c’était en Août 2022.

Il y a le vétéran Michel Soro, dont on a parlé il y a quelques temps. Un mec maudit, le plus valeureux de tous, et d’assez loin, mais qui s’est encore fait voler cet été et n’en finit plus, malgré des performances toujours bonnes, de s’éloigner du top mondial. Il a 36 ou 37 ans désormais, un âge canonique chez les super-welters. Que lui souhaiter ? Un combat rémunérateur contre une étoile montante, peut-être.


Et puis, last but not least, il y a notre Tony Yoka national. On a probablement déjà tout dit à son sujet. Il a changé d’entraîneur et affrontera en Décembre, pour son 14eme combat en 6 ans, le Belge Mehry, qui est en réalité davantage un Cruiser, de niveau européen. Raisonnable et audible, même si on ne voit pas bien Tony relancer quoi que ce soit.

Il avait signé avec C+ un contrat pour 15 combats. On arrive au bout. Quelle sera la suite ? Ou, plus précisément, comment finir cela dignement ? Un championnat d’Europe un peu bidon ? Possible quoique peut-être un peu court en termes de timing.

Un retour aux J.O pour Paris 2024, si la France ne trouve pas de poids lourds de bon niveau à présenter d’ici là, n’est même pas à exclure. Ça paraît énorme, mais très honnêtement, je me dis que c’est possible. Après tout, le grand public n’y entrave que dalle à tout ça.

[Shogun]

J'ai été jeter un oeil à tout ça et puis bien sûr j'ai dévié sur du vieux...
Une petite rétrospective que j'ai trouvé sympa.

https://m.youtube.co...h?v=puXXp36IEWA

[Pierre_Minus]

Duran ”j’avais bu trop de jus d’orange, j’avais mal au ventre” haha. Après, ça a été les côtelettes avariées. On était tout près d’Obelix et ses ”sangliers qui ont mangé des cochonneries”.

Le truc incroyable c’est que beaucoup voyaient Duran fini après cet épisode, en 1980. Et pourtant le gars combattra jusqu’en 2000 ou 2001. Avec encore un sacré paquet de combats de très haut vol voire carrément mythiques notamment ceux contre Hagler et Hearns.

Faut voir que le gars avait commencé en poids plumes, ou même coqs je crois, il est probablement le meilleur poids légers toutes époques confondues (il est déjà une légende avant ce combat), et il a fini en super-moyens. Il a tenu tête voire a battu des types à la morphologie naturelle sans commune mesure avec la sienne.

Concernant le ”No Mas”, cet épisode aura surtout marqué Léonard. Duran n'en a jamais rien eu à branler, d’ailleurs on a toutes les raisons de penser qu’il se branlait de tout et spécialement de son image. Ce qui, au passage, est assez curieux, à la fois très Latino, et pas Latino du tout.

En cela il est l’exact opposé de Léonard.

Je crois vraiment que ce dernier, dont le boulard n’a guère d’équivalent dans l’Histoire de la boxe, n’a jamais supporté que Duran le prive de revanche en abandonnant. Car on a, finalement, surtout parlé de ça, du ”no mas”, bien plus que de la victoire de Léonard. Il y a eu une belle, +/- 10 ans plus tard, le ”Uno Mas”, remportée par Léonard (comme quoi le mec l’avait en travers), mais sans intérêt.

En gros, c’est comme si Léonard n’avait jamais vraiment battu Duran. Je crois vraiment que c’est comme ça qu’il voit les choses. Et ça le fait chier.

Je l’avais vu aussi, provoquer Hearns sur un plateau télé il y a quelques années. Soi-disant pour déconner, alors que le Hitman n’en avait visiblement rien à foutre. Bref le beau Sugar Ray, même à plus de 60 piges, avait encore des choses à prouver.

Le monde se divise en deux catégories n’est-ce pas. Ceux qui ont éternellement des choses à prouver, et ceux qui sont passés à autre chose.

Des 4 fantastiques, Leonard-Duran-Hearns-Hagler, c’est lui qui m’intéresse le moins. Les 3 autres ne calculaient pas, notamment Hearns qui en bon élève du Kronk Gym, mettait le panache et les tripes avant tout le reste, ce qui lui a coûté je pense quelques places dans la hiérarchie des légendes de ce sport. Bon il est déjà très haut, hein.

[Le pote au laid]

Ouch le coup bas de Duran sur l'Écossais ! Tu m'étonnes qu'il a pissé du sang pendant des jours...

Pour en revenir à cet âge d'or de la boxe, Léonard avait un désavantage sur les autres qui rend quand même son parcours incroyable. C'est son origine sociale.
Lui n'avait pas de revanche à prendre sur la vie. Issu d'un milieu relativement favorisé, il était loin du gamin des rues, de la bête sauvage rééduquée par le sport mais qui le redevient au 1er coup de gong, tel Duran ou Hagler. C'est ça qui me fascine chez lui.

[Pierre_Minus]

Dans le même genre, on pourrait citer le Mexicain Barrera, également Hall of Famer et membre émérite d’un autre quatuor historique (avec son grand rival Morales, Pacquiao, et Juan Manuel Marquez).

Le mec avait fait des études d’architecture, son père était je crois producteur pour la TV. Rien à avoir avec Morales le chien de la casse de Tijuana, ou Pacquiao dont le parcours est au-delà du romanesque. Lui c’est vraiment LA misère noire, un peu comme Monzon aussi.

Ali non plus ne sortait pas de la rue comme Foreman, ou du fin fond de la Caroline du Sud comme Frazier.

Après, bien évidemment les premiers pourvoyeurs de champions sont quand même globalement les ghettos noirs américains et les barrios/favelas pourraves d’Amérique latine. Ce qui est curieux c’est qu’il s’agit plutôt d’Amérique centrale, ou de la côte Caraïbe de l’Amsud. Mexique bien sûr, Cuba, Porto-Rico. Le Vénézuela et la Colombie, un peu.

Il y a quelques gars en Argentine (qui sort un cador de temps en temps), au Brésil, sans plus. Quant au Chili, Paraguay, Pérou, Bolivie ... je serais bien incapable de citer un boxeur issu de ces pays, bref.

Les pays de l’ancien bloc de l’Est on sorti un paquet de boxeurs aussi ces dernières années. Kazakhstan, Ukraine, Russie ont plusieurs champions du monde. Le Japon aussi est un grand pays de boxe. Les Philippines, la Thaïlande. Pour ces 3 derniers pays, sans surprise, ce sont surtout les petites catégories qui sont concernées.

Même l’Australie compte aujourd'hui 2 champions du monde, Opetaia chez les Cruisers et Tszyu chez les super-welters. Et 5-6 autres types de niveau top 20-30 mondial dans d’autres catégories.

En France, on n’a pas grand monde. J’en ai cité quelques uns qui sont de niveau mondial ou en sont proches, j’en ai peut-être oublié un, ou deux ... mais on voit que le décompte est vite fait.

Pourtant, quand on regarde le nombre de footballeurs de niveau mondial qui sortent de nos banlieues, je ne peux m’empêcher de penser qu’on passe à côté de quelque chose.

[Le pote au laid]

Nos footeux issus des cités sortent du lot parce qu'ils sont doués, pas parce qu'ils ont faim et ont dû se battre pour survivre.
Tu trouveras peut-être le futur équivalent français d'un Hagler ou un Duran parmi les MNA ou migrants récemment débarqués du Soudan, mais pas parmi les banlieusards nourris depuis leur enfance par les aides sociales et l'économie souterraine.